Prague (République tchèque), 23.06.2008. Rencontre
avec Jan Tamas, un des principaux responsables du Mouvement
pacifiste tchèque, qui a mené une grève
de la faim en mai 2008
Mais qui sont donc ces Tchèques aux allures d'Astérix qui tiennent
tête à l'OTAN et se battent pied à pied contre l'installation
de bases américaines en Tchéquie dans le cadre de la mise en
place du bouclier antimissile américain?
Rendez-vous est pris avec Jan Tamas, dans son QG à deux pas
de Vaklavske Namesti, au centre de Prague, ce lundi 23 juin
2008. Accueil chaleureux par les deux leaders du mouvement pacifiste
tchèque, Jan Tamas et Jan Bednar, qui ont défrayé récemment
la chronique avec leur grève de la faim entre le 13 mai et le
3 juin 2008.
Retour sur deux années de mobilisation de la coalition d'organisations
qui mène la vie dure à l'État major de l'OTAN et aux visées
militaristes américaines. La force de cette mobilisation, ce
n'est pas tant la perception accrue du danger par la population
tchèque puisque c'est la première fois qu'une base stratégique
est installée si près d'une grande ville, c'est avant tout l'union
de divers mouvement très hétéroclites tels que Humanisticke
Hnuti (Mouvement Humaniste), Greenpeace, Mayors for peace (maires
pour la paix), le Parti communiste de la Bohême et de la Moravie
(KSCM), le Parti tchèque social-démocrate (CSSD) ou encore des
syndicalistes et des citoyen(ne)s. Dés que les Tchèques ont
appris que le gouvernement négociait l'installation d'une base
radar dans le cadre du bouclier antimissile [1], dans la région
de Brdi, à 60 km au sud ouest de la capitale, Prague, la mobilisation
n'a cessé de grandir, avec l'organisation de manifestations
à Prague, de pétitions, d'actions spectaculaires telles que
l'arrimage d'un gigantesque ballon, ou encore de conférences
internationales avec l'intervention de personnalités. Jan Tamas
a effectué une tournée européenne pour alerter l'opinion publique,
et a même été reçu au Congrès américain. Mais le gouvernement
Tchèque, malgré une large majorité de plus de 2/3 de ses concitoyen(ne)s
opposés à l'installation de la base Radar [2] a poursuivi les
négociations avec les États Unis, prévoyant même la signature
d'un traité le 5 mai 2008. C'est à ce moment que fut décidé
la grève de la faim. Une première victoire a été que la date
de signature de ce traité a été sans cesse repoussée, par un
gouvernement gêné aux entournures, et qu'aux dernières nouvelles,
la date prévue pourrait être le 8 juillet prochain, lorsque
la secrétaire d'État américaine Condoleezza Rice doit venir
à Prague pour la signature du traité.
La coalition pacifiste a dors déjà prévenu qu'une manifestation
serait organisée ce jour-là, appelé D-day, à 18 heures sur Vaklavske
Namesti. Par ailleurs, à l'initative de la coalition
pacifiste, une conférence se tiendra au parlement européen
le 9 juillet à Strasbourg avec des députés
issus notamment des trois groupes: Social-démocrate,
Gauche unie et Vert. De plus, Humanisticke Hnuti organise une
conférence le 17 juillet avec la présence du vice chairman du
parlement Européen, d'un parlementaire américain, Dennis Kucinick,
membre du Congrès et de Jan Tamas.
La mobilisation ne s'arrêtera pas là. Même après signature
d'un éventuel traité américano-tchèque, le parlement doit l'approuver.
Une grande bataille parlementaire y est attendue à l'automne,
puisque le parlement est partagé à 50-50 sur cette question
hautement sensible auprès de l'opinion publique. Si les communistes
du KSCM et la quasi-totalité des socialistes du CSSD sont résolument
opposés à l'installation de la base radar américaine, les Verts
(membres de la coalition de centre-droit au pouvoir) sont partagés,
de même que les partis de droite.
A l'image de notre célèbre Astérix face à la force de frappe
de l'empire Romain, et fort de son engagement humaniste pour
la paix et contre les armes nucléaires, l'OTAN et le déploiement
du bouclier antimissile, sûr que Jan Tamas va continuer de donner
du fil à retordre aux États Unis.
[1] «
Non au bouclier antimissile » Planète Paix, No 529, février
2008
[2] les sondages affirment que 66 à 70% des Tchèques sont hostiles
au Bouclier antimissile


Jan Tamas (Humanisticke Hnuti) & Patrice
Salzenstein (Mouvement de la Paix)

Planète Paix, No 534, page 18