10ème
Forum International des ONG en partenariat officiel avec
l'UNESCO,
la
Fondation Russe pour la Paix et l'Académie des
Sciences de Russie
- compte-rendu par
Patrice SALZENSTEIN -
Ce dixième
Forum s'est tenue à l'hôtel Ritz-Carton de
Moscou, non loin de la Place Rouge. Il était organisé
par le comité de liaison de l'UNESCO et consacrée
à la thématique "Science, bien commun de
l'humanité". Les langues utilisées étaient
le russe, le français et l'anglais.
Ce Forum a réuni
entre 300 et 600 scientifiques et membres d'organisations non
gouvernementales venus de 51 pays du monde. L'événement
a réuni plus de 20 séances plénières
ou parallèles, des tables rondes et des groupes de
travail regroupant des organisations non gouvernementales,
des personnalités de la société civile
et de la communauté scientifique, pour une réflexion
commune sur le renforcement de la responsabilité
sociale des sciences et des scientifiques, ainsi que leur
impact sur la prise de décisions politiques. Une
attention toute particulière a été
accordée aux problèmes éthiques de la
science, et les interaction de l'homme, de la nature et de
les modifications environnementales liées aux
activités humaines, aux réponses possibles aux
défis mondiaux de la civilisation, ainsi que le
développement de grands projets internationaux. Une
séance plénière séparée a
également été consacrée à
la diplomatie scientifique. Lors de la séance de
synthèse, les scientifiques et les chercheurs ont
convenu que la diplomatie scientifique dans le monde
d'aujourd'hui était le mécanisme le plus
efficace pour soutenir les relations internationales. "La
diplomatie scientifique prend de l'ampleur chaque année
et on peut croire qu'elle devienne l'un des éléments
clés de la pratique sociale mondiale d'aujourd'hui",
- a souligné lors de la cérémonie de
clôture du forum le chef du Comité international
de la Douma russe, Leonid SLOUTSKY [source : RIA
NOVOSTI]. Des personalités telles que le Ministre
russe des affaires Étrangères, Sergueï
LAVROV, le directeur général adjoint de
l'UNESCO, Shin QU, le président de l'Académie
des sciences de Russie Alexandre SERGEEV, l'historienne
Hélène CARRERE D'ENCAUSSE, ou l'économiste
français Jacques SAPIR.
Il n'est pas
possible ici de rendre compte de toutes les sessions. Parmi
les plus marquantes :
- Une session
distincte a été consacrée aux relations
russo-américaines au travers de la thématique
"Science pour la paix : assurer la paix et la
stabilité au XXIème siècle au travers de
la quête d'une science basée sur le
développement durable". Les principaux stocks
d'armes nucléaires sont concentrés en Russie et
aux États-Unis, et la sécurité mondiale
et la stabilité politique dans le monde dépendent
principalement de ces deux pays. L'objectif principal est
d'éviter le conflit nucléaire. En ouvrant la
session, le doyen de la faculté de politique mondiale
de l'Université d’état de Moscou,
l'académicien Andreï KOKOSHIN, a noté que
"le problème de la stabilité politique
est très préoccupant aujourd'hui"
[Source : Rareearth.ru].
Et cela est dû principalement au fait que les accords
bilatéraux entre les États-Unis et la Russie
dans le domaine de la maîtrise des armements cessent de
fonctionner avec la dénonciation de traités
datant de 1987 sur les armes nucléaires de portée
intermédiaire.
- Une autre
session du thème Science et Paix a été
consacrée à la thématique "Science
et Art pour la Paix". Lors de cette session modérée
par Patrick GALLAUD (Directeur adjoint du comité de
liaison de l'UNESCO), on retiendra en particulier la
présentation très riche de Stéphanie LE
FOLLIC-HADIDA (représentante de l'académie
internationale de la céramique auprès de
l'UNESCO). Cette intervenante genevoise a montré
comment l'argile tient une place importante dans des domaines
aussi variés que l'habitat, l'art et la technologie.
Elle a été suivie de celle de Shlomit BAUMAN
(académie internationale de la céramique) qui a
détaillé le projet "Argile pour la paix"
impliquant plusieurs pays du moyen orient dont des ateliers
israélo-palestiniens autour de la poterie. Natalia
KHLEBTSEVICH (artiste et professeur à Moscou) a
présenté un projet artistique impliquant la
réalisation d'objets par impression 3D.
- On notera la
richesse du niveau des interventions. A retenir, celle de
Feodor VOITOLOVSKY (Directeur à l'Institut de
l'économie mondiale et des relatons internationales de
l'académie des sciences de Russie – IMEMO) qui a
brillamment décrit l'état des échanges
économiques entre les grandes puissances et notamment
ce qui concerne la géostratégie militaire et
les ventes d'armes. Je suis intervenu en russe dans cette
session pour décrire l'engagement des forces
françaises dans les divers conflits en cours et
dénoncer l'augmentation sans précédent
du budget des Armées ainsi que des crédits
consacrés à la modernisation des armes
nucléaires françaises.
Article
à consulter :
P.
Salzenstein, "Science
Bien commun de l'Humanité," Planète
Paix
639-640,
14 (2019).
Voici quelques
photos :
 Discours
de Sergueï LAVROV (ministre des affaires étrangères
de la Fédération de Russie) lors de la
cérémonie d'ouverture (ci-dessus et
ci-dessous).

 Discours
d'Hélène CARRERE D'ENCAUSSE (historienne,
secrétaire perpétuelle de l'Académie
Française, Professeur, Femme politique) lors de la
plénière consacrée à "Diplomatie
scientifique en tant que facteur de coopération
internationale et de sécurité globale". A
noter qu'elle a fait son discours en russe. Ci-dessous
également.
 En
off, lors d'une discussion à laquelle j'ai eu plaisir
à participer, cela a été intéressant
d'écouter cette Grande Dame de 89 ans toujours aussi
vive et qui apporte décidément une voix
originale et essentielle dans les grands débats
géostratégiques de notre époque. Elle a
notamment évoqué les massacres des Héréros
et des Namas perpétré sous les ordres de Lothar
von Trotha dans le Sud-Ouest africain allemand dans
l'actuelle Namibie à partir de 1904, qui sont
considéré comme le premier génocide du
XXe siècle. En effet, les forces armées
allemandes ont mené un programme d'extermination
inscrit au sein d'un processus de conquête d'un
territoire par les troupes coloniales allemandes entre 1884
et 1913. Il entraîna la mort de 80 % des autochtones
insurgés et de leurs familles (65000 Héréros
et près de 20000 Namas). En cette année de
centenaire de la fin de la Grande Guerre, Hélène
CARRERE D'ENCAUSSE et Jacques SAPIR sont tombés
d'accord sur fait que ces massacres sans pitié
couverts par l'état major allemand ont certainement
influencé la stratégie militaire allemande au
début de la première guerre mondiale, et leur a
donné un avantage en première partie du
conflit.
 Jacques
SAPIR (économiste, école des hautes études
en sciences sociales – EHESS) est intervenu lors de la
session consacrée à "Science pour la
paix".
 Shlomit
BAUMAN (à gauche) et Stéphanie LE FOLLIC-HADIDA
(représentante de l'académie internationale de
la céramique).
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